J’adore cuisiner. Et manger (surtout). C’est un fait non-négligeable !
J’ai commencé à repenser mon alimentation lorsque des troubles physiologiques sont apparus dans ma vingtaine (j’en ai à ce jour 32). Il faut dire que mon régime d’étudiante était principalement composé de Starbucks, de Mcdo, de sushis et de Kinder que je dévorais par lot de cinq pendant mes cours magistraux. Mon corps m’a fait savoir au bout de quelques mois que ce régime n’était pas viable en faisant clignoter ses feux de détresse. Comme j’aime comprendre ce qu’il se passe, j’ai fait quelques recherches sur la malbouffe et ses conséquences sur la santé. Effet boule de neige. Quand on s’intéresse au sommet de l’iceberg, on finit par découvrir ce qu’il se cache sous la surface de l’eau : lobbyisme, pesticides, aliments ultra-transformés, OGM, sucres cachés, agriculteurs étranglés etc…
C’est donc pour des raisons de santé et éthique je me suis prise au jeu de la cuisine. Ce qui était une “nécessité” est devenue un loisir et une habitude. Faire soi-même est pour moi, un des piliers de la simplicité volontaire. Cuisiner, c’est reprendre le contrôle de son alimentation à bien des égards. Je vais tenter aujourd’hui de vous transmettre ce qui m’anime lorsque je cuisine.
Pourquoi (re)prendre en main son alimentation ?
Alimentation et santé
“Que ton alimentation soit ta première médecine” disait Hippocrate. C’est lors de ma reconversion dans le domaine du bien-être que j’ai découvert l’impact de ce que nous mangeons sur notre santé. Les médecines orientales notamment ou la naturopathie, prennent en compte l’individu de manière holistique. C’est-à-dire qu’elles ne dissocient pas les parties du corps, l’état de santé physique et mental. Tous les environnements biologiques et psychologiques d’un humain interagissent entre eux. L’alimentation fait donc partie intégrante du bien-être et de la santé.
En Médecine Traditionnelle Chinoise, pour parler d’un domaine que je pratique, on considère que notre énergie vitale, le “Jing” se loge aux creux des reins. Il y a deux sortes de Jing :
- Le Jing de naissance ou “Ciel Antérieur” : le capital d’énergie dont nous disposons dès notre venue au monde, hérité de celui de nos parents et de notre lignée. Il diminue tout au long de notre vie, telle une bougie qui se consume.
- Le Jing nourricier ou “Ciel Postérieur” : l’énergie que nous captons de notre “nourriture” au sens large du terme : aliments, air que nous respirons, eau, mode vie etc… Elle viendra cultiver ou brûler notre capital énergétique. Plus cette énergie sera nourrissante, meilleurs seront votre bien-être et votre santé.
Ce que j’ai pu constater dans ma propre famille : changer d’alimentation nous a permis de corriger des troubles physiologiques chroniques et nous tombons très peu malade.
Que mangeons-nous exactement ?
Vous êtes-vous déjà penché sur l’étiquette de cette boîte de raviolis que vous avez l’habitude de consommer ? Y avez-vous aperçu des ingrédients étranges ? E bidule, conservateur, antioxydant etc. D’où vient ce que l’on mange ? Sommes-nous seulement capables de dire quel agriculteur a fait pousser cette pomme de terre qui est dans votre assiette ? Comment a été élevé cet agneau que vous mangez ?
Nous sommes complètement coupés de nos sources de nourriture : la nature et ceux qui la cultivent. Cela n’était jamais arrivé avant l’industrialisation de l’alimentation. De plus en plus d’individus souhaitent s’y reconnecter en se rapprochant des producteurs locaux, des AMAP, des ruches. Favoriser cette économie circulaire est plus respectueuse de la nature et des humains qui produisent nos aliments (meilleure rémunération, moins d’intermédiaires…). Je prends énormément de plaisir à aller chercher mon fromage (Suisse !) dans une des nombreuses fromageries indépendantes de la vallée. Il est fabriqué à partir de lait local (ici les bêtes vivent une grande partie de l’année en extérieur). Je sais d’où ça vient et que mon argent revient directement à ces producteurs. Je me rappelle ainsi que ce que je mange ne m’est pas dû. Il a fallu que quelqu’un s’occupe d’élever les animaux et de fabriquer le fromage pour moi.
Cuisine et environnement
L’ADEME estime à peu près à 10 millions de tonnes la quantité de nourriture consommable gaspillée chaque année, soit l’équivalent de 150 kg par habitant. Parmi les ordures ménagères et assimilées, on trouve l’équivalent de 20kg/habitant de déchets alimentaires, dont 7kg encore emballés. Voici en autre les conséquences d’une consommation déraisonnée de notre nourriture et du suremballage des aliments. On peut aussi citer en vrac d’autres effets :
- La déforestation pour laisser place à la culture intensive de soja et de maïs pour nourrir le bétail.
- La création de fermes-usines, catastrophiques sur le plan du bien-être animal et de la pollution (l’élevage est responsable de 14,5% des gaz à effets de serre selon Greenpeace, autant que le secteur du transport !).
- Le rejet de multiples emballages plastiques des fast-food et des plats tout prêt.
- La surpêche et la destruction des fonds marins par les énormes chaluts.
- L’appauvrissement des sols.
- La pollution générée par l’import de produits à l’autre bout du monde.
Cuisiner des produits simples, frais et locaux est le meilleur moyen d’endiguer à terme cette pollution exponentielle générée par toute l’industrie agro-alimentaire. Mangez des aliments bruts et frais. Bien sûr, nous avons tous nos contraintes et moi-même je cède par moment à la facilité d’une pizza surgelée ou d’un régime de bananes. Nous ne pouvons pas être parfaits. Mais il est temps de faire les choses plus en conscience.
Pourquoi avons-nous oublié de cuisiner ?
Depuis les années 50, la technologie et l’industrie agro-alimentaire ont permis aux individus, de simplifier la cuisine pour la rendre plus facile et plus rapide : sauces toutes prêtes, robots ménagers de toutes sortes, etc. Loin de moi l’idée de diaboliser ce progrès, car il y a du bon en tout. J’ai moi-même quelques robots qui m’accompagnent pour m’aider à faire tout moi-même. Mais ne sommes-nous pas tombé dans l’excès ? Nous passons deux fois moins de temps en cuisine que nos grands-mères mais passons plus de temps devant les écrans de télé ou de smartphone. Est-ce mieux ?
J’ai la sensation que la cuisine, à une époque l’apanage des femmes, est devenue une tâche “ingrate”, comme toutes les autres tâches ménagères. Les femmes se sont certes progressivement libérées de l’image d’Epinal de la ménagère parfaite au service de son mari et de ses enfants. Malheureusement, les activités de la maison ne sont pas toujours bien réparties dans les familles aujourd’hui. Et si une femme n’a pas vocation à cuisiner, le fait est que personne ne prend le relais. La cuisine devient une corvée pour tout le monde. Elle perd ses valeurs essentielles : nourrir, faire de ses mains, apporter du plaisir, rassembler.
Heureusement aujourd’hui, la tendance s’inverse. Mus par l’avènement des émissions culinaires dynamiques, des blogs, de Youtube et des réseaux sociaux, les individus retournent en cuisine ! Femmes et hommes ! Les consciences s’éveillent au bien manger, au plaisir de partager un bon repas en famille, entre amis ou seul !
Comment (re)trouver le goût de cuisiner ?
Je pense pour ma part que pour aimer cuisiner il faut aimer manger. Et manger, c’est un de nos besoins primaires à combler pour être en bonne santé et heureux. Donc quitte à passer du temps à se nourrir, autant y prendre du plaisir ! Pourtant j’entends souvent dire “je n’aime pas cuisiner”. N’aimez-vous pas manger ? C’est tout à fait possible, je connais une personne de mon entourage pour qui c’est le cas. Mais dans l’ensemble, nous avons plutôt tendance à nous trouver des excuses pour ne pas cuisiner : “j’ai la flemme”, “je n’ai pas le temps”, “je ne vois pas l’intérêt de me faire à manger je vis seul(e)”…
La première chose à faire alors, est de se fixer des objectifs. C’est ce qui vous permettra d’avancer sans perdre le cap :
- Je veux cuisiner pour mieux contrôler mon alimentation.
- Je veux cuisiner pour moi, pour apprendre à faire quelque chose de mes mains.
- Je veux cuisiner pour me faire plaisir et faire plaisir aux autres.
- Je veux cuisiner pour des raisons éthiques et environnementales.
Puis, il est important de déterminer quelles sont les barrières qui vous empêchent de passer à l’action :
- Le manque de temps : le temps, ça se prend, c’est un choix à faire. De plus, des méthodes se démocratisent pour s’organiser en cuisine comme faire des menus, le batchcooking. Je vous invite à consulter le blog et le compte Instagram de Chloé My Slow Life qui partage ses astuces de batchcooking. On ne compte plus aussi le nombre de livres de recettes prêtes en moins de 20 minutes.
- La flemme : fixez-vous un objectif et donnez-vous un coup de pied aux fesses !
- Je ne sais pas cuisiner : tout s’apprend. Il ne s’agit pas de reproduire des plats de chefs étoilés. Si vous pouvez trouver de l’inspiration dans des vidéos Youtube ou des livres de recettes, je crois que la clé est l’expérimentation. Faites, essayez ! J’ai tenté cinq fois de faire une brioche avant de la réussir ! On tire une très grande fierté de ce que nous faisons nous-même. On prend confiance en nous, cela nous donne envie d’aller plus loin encore, on tente des plats plus complexes. Mais c’est souvent de la cuisine instinctive que sortent les meilleures recettes.
- Je ne prends pas de plaisir à cuisiner : je comprends. Peut-être est-ce votre point de vue sur la cuisine qu’il faut modifier ? Moins voir ça comme “une corvée” mais plutôt comme quelque chose qui peut vous apporter beaucoup. Prendre du plaisir à faire les choses est essentiel. Accompagnez votre session cuisine d’un reportage, d’un podcast, de musique, de quelque chose qui vous fait plaisir. Cela peut faciliter les choses !
Cuisine et simplicité volontaire
La sobriété alimentaire
Vous avez pris la décision de cuisiner ou alors êtes déjà rôdé en la matière. C’est parfait ! Je voudrais simplement pousser la réflexion un petit peu plus loin. Notamment sur la notion de simplicité volontaire et de sobriété alimentaire. Je crois qu’il est important de souligner à quel point notre mode d’alimentation est notre bulletin de vote. En refusant de consommer des denrées importées de l’autre bout du monde, vous dites non à la pollution de ces échanges commerciaux. En choisissant de consommer local, ou de vous faire votre propre potager, vos bocaux, c’est dire non à la surconsommation et aux produits ultra-transformés.
Je ne crois pas que nous ayons besoin d’acheter des dizaines de sortes d’ingrédients, d’épices, d’oléagineux, de graines pour bien manger, ni de consommer de la viande tous les jours. La sobriété alimentaire consisterait à être capable de se nourrir avec ce qu’il y a autour de nous, ou éventuellement sur notre territoire. C’est bien sûr très difficile selon l’endroit où nous habitons (je vis en montagne par exemple, nous avons peu de maraîchers). Le commerce n’est pas une mauvaise chose. Je ne vois pas de problèmes à consommer des fruits qui viendraient d’une autre région de France (ou de Suisse, puisque j’y vis actuellement).
Mais avons-nous besoin de lait de coco ? De noix de cajou (même si c’est très bon, je vous l’accorde) ? De mangues ? D’avocats (dont l’agriculture est responsable de déforestation en Amérique du Sud) ? Tout du moins, est-il nécessaire d’en consommer tous les jours ? Ces aliments produits à l’autre bout du monde, devraient selon moi, rester un luxe, à consommer avec modération.
De l’art du geste simple
Il y a quelque chose, je trouve de poétique dans le fait de cuisiner. De la même manière qu’un potier ou un sculpteur travaille sa matière première amoureusement, j’aime observer mes mains couper les légumes, pétrir le pain, assaisonner un plat. J’exerce mon palais à ressentir les saveurs et à trouver celle qui charmera mes papilles. Je me réjouis de cuisiner un bon petit plat pour me faire plaisir et contenter mon compagnon. Je sais alors que le repas du soir sera un moment de joie, où nous partagerons notre journée. A ce moment précis, je ne ressens pas le besoin d’être au restaurant ni d’avoir une table couverte de mets. Ce plat cuisiné avec le cœur, fait tout à lui seul. La cuisine alors devient un plaisir simple.
La simplicité volontaire en cuisine c’est cela à mon sens : privilégier des recettes simples, faciles à faire (la cuisine ne devant pas devenir une charge mentale), avec des ingrédients dont on connaît la provenance. L’environnement et votre porte-monnaie vous en remercieront ! Si vous êtes dans une démarche de simplicité volontaire alors, vous trouverez les clés en vous pour apprendre et aimer cuisiner. Cependant, je crois que nous autres êtres humains, nous nous mettons beaucoup de pression pour “réussir” du premier coup, ou bien nous “attendons le bon moment”. Le bon moment n’existe pas. C’est quand vous le décidez. Soyez doux avec vous-même, vous apprendrez, comme j’apprends depuis dix ans. Lao-Tseu disait “un voyage de mille lieues commence par un premier pas”. Faites ce premier pas pour vous et la planète qui vous nourrit.